VIA DOMITIA

Témoignage archéologique exceptionnel, la Via Domitia est la plus ancienne voie de communication tracée par les Romains en Gaule et la mieux conservée. Longue d'environ 500 km, elle reliait les péninsules italienne et ibérique à travers la province de Transalpine, des Alpes aux Pyrénées qu'elle franchissait au col de Panissars, près du Perthus. Utilisée jusqu'au XVIIe s., la voie romaine guida la mise en place du réseau ferroviaire et autoroutier de la région.


UNE, R0UTE "CONFORTABLE". Après la conquête de 122 av. J.-C, les Romains construisirent d'un bout à l'autre de la nouvelle province une route qui suivait l'ancienne voie héracléenne, chemin mythique qu'aurait tracé Héraclès à son retour d'Espagne. Elle prit le nom du conquérant Cneius Domitius Ahenobarbus qui restaura et aménagea une voie déjà en partie construite. En effet, il existait vraisemblablement un réseau de routes carrossables aménagé par les Gaulois et qui devait desservir les oppida. Pavée ou dallée à la traversée des villes, mais simple chemin de terre en rase campagne, la Via Domitia fut tracée de manière quasi rectiligne. Restaurée et reconstruite à plusieurs reprises par nécessité ou à des fins de propagande par des empereurs soucieux de donner d'eux une image de bienfaiteurs, la route fut aménagée afin de permettre un transport confortable. Tous les 25 à 35 km, elle était ponctuée de relais d'étape, les mansiones, où l'on pouvait passer la nuit et, tous les 10 à 15 km, de relais de poste, les mutationes, pour changer de chevaux. Les fouilles archéologiques ont mis au jour certains de ces sites, comme celui d'Ambrussum. En outre, des repères de distance guidaient les voyageurs : des bornes, érigées tous les milles (1,481 km), à partir du chef-lieu de la cité. Ces bornes milliaires portaient souvent des inscriptions mentionnant la distance, mais aussi le nom de l'empereur et la formule « fecit », « refecit » ou « restituit », ce qui permettait de dater les travaux. Au total, 90 bornes milliaires ont été signalées, dont 67 encore visibles, in situ ou dans des musées archéologiques de la région. Le plus ancien milliaire de Gaule a été trouvé sur la Via Domitia. Daté de 118 av. J.-C, il porte le nom de Domitius. Enfin, la Via Domitia fut équipée d'ouvrages d'art, notamment de ponts pour circuler même en cas de crue torrentielle des fleuves côtiers. Parmi les plus célèbres, le Pont d'Ambrussum, classé aux Monuments historiques depuis 1840, le « Pont-Vieux » à Béziers, le Pont-des-Marchands à Narbonne, exemple unique de pont construit de maisons dans le sud de la France et devenu une rue piétonnière, le pont de Castelnau-le-Lez, le pont de Sommières avec ses dix-sept arches, le plus long et le mieux conservé des ponts romains du Midi ou encore le pont de Boisseron. La Via Domitia devint très vite un axe stratégique, politique et commercial. Elle était fréquentée par les légions qui protégeaient les colonies de peuplement. Les fonctionnaires l'empruntaient, en particulier ceux de la poste impériale. Les marchands l'utilisaient pour le commerce local, entre les bourgs voisins et, au-delà, dans les échanges avec Rome.

UN MOTEUR ÉCONOMIQUE. Lien entre de grandes cités, comme Nîmes, Béziers, Narbonne et Ruscino/Château Roussillon, la Voie domitienne activa la vie économique de la région. Elle fut fréquentée par les marchands, les voyageurs et les pèlerins pendant tout l'Empire et au Moyen Age. Loin d'être tombée dans l'oubli, la Via Domitia, plus ancienne route construite en France, est un véritable fil conducteur pour découvrir de nombreux sites, villes et villages du Languedoc-Roussillon. De Beaucaire au Perthus, elle est sans doute le plus beau support de la mémoire régionale