HISTOIRE LA
PRÉHISTOIRE : Appartenant à un espace de plateaux calcaires et de combes particulièrement propices à l'habitat primitif, la région de Lussan est riche au point de vue préhistorique. Si le témoignage le plus spectaculaire de cette richesse est le MENHIR DE LA LEQUE, dit de LA PIERRE PLANTEE ou PIERREFICHE (avec ses 5,60 m de hauteur il est signalé comme le plus haut de tout le sud-est de la France), nombreuses sont les grottes qui ont servi à l'habitat préhistorique ou aux sépultures de ces temps reculés. Un certain nombre d'entre elles, à la suite des découvertes qui y ont été faites, figurent en bonne place sur la carte de l'archéologie préhistorique de notre région comme le site de LAS
TRÈS TINOS, la GROTTE DES FEES, la grotte SEPULCRALE DU RENARD, l'AVEN DU CAMELIER (à l'origine Camp Milhièr : champ de mais, francisé en chamelier!). Les habitats temporaires nés de la nécessité de se défendre (oppida des Serres de Saint Martin et de Saint Pierre, de la Lèque et probablement de Prades et de Lussan) vont soit être abandonnés dans les époques les plus sûres, soit devenir l'objet d'un habitat permanent. LA
PÉRIODE GALLO-ROMAINE : L'examen des noms de lieux et les éléments d'histoire que nous possédons nous révèlent que la Lussanenque fut un lieu de fixation de colons romains qui impulsèrent à la région un certain développement dès les 2ème ou 3ème siècle après J.C. La présence révélatrice de suffixes comme -AN,-AC et -ARGUE qui étaient utilisés pour nommer les domaines et qui s'ajoutaient au nom des propriétaires nous permet de nous faire une idée sur les aspects que la Lussanenque a pris dans ces temps lointains. Nous pouvons même avancer quelques dates en resserrant les approximations : le suffixe -AN étant latin et caractéristique de l'époque où les Romains se sont installés, on peut supposer que c'est dans les IIème/IIIème siècles que le Lussan actuel naît en tant que "Domaine de Lucius". Il reste également de cette époque un témoignage concret une statue en bas relief de la source de FAN (autre nom latin supposant la présence d'un Fanum, temple) que l'on peut admirer aujourd'hui dans le hall de la Mairie, au château de Lussan. LA
FÉODALITÉ : L'époque romane et le début du Moyen Age ont été des périodes d'extension de la population et de défrichements. En lisière de la combe de Lussan et de la vaste plaine de la Valcroze, adossés aux rancs ou assis sur des serres, un certain nombre de hameaux et de mas se développent : Bech devenu Beth, Lauron, Prades, Dizier, le Roux qui gardent parfois un cachet roman ou ancien que l'amateur appréciera. A la croisée des voies de communications apparaît Malataverne, tandis qu'au fond des bois se cachent les Mas de Roussière et de Malaïgue, ce dernier aujourd'hui en ruines. Parallèlement les hameaux les plus anciens s'étoffent : Lussan sortira de ses barris (remparts), Vendras se présente en deux agglomérations qui ont fait aujourd'hui leur jonction, Crouzet s'allonge de part et d autre de son étroite ruelle centrale.... Cette période est évidemment marquée par la fortification du site de Lussan sous l'impulsion des seigneurs du lieu, les AUDIBERT. LES AUDIBERT : Venue d'Outre-Rhône, cette famille seigneuriale va lier son nom a celui de Lussan pendant plus de cinq siècles : à elle ce nom de Lussan va même apparaître pour la première fois officiellement pour la première Croisade d'un seigneur ALDEBERT de Lussan et de ses hommes. Ce sont ses descendants qui vont achever de fortifier le lieu, renforcer le premier château (château du Verger) et construire par la suite les deux autres châteaux que nous avons actuellement, ainsi que la chapelle qui existe toujours bien que privée de son campanile. Mais les aléas de l'histoire vont distendre et dissoudre les rapports qui liaient les Lussanais à leur famille seigneuriale. En effet, alors que l'écrasante majorité des Lussanais restera attachée à la pratique du protestantisme malgré la Révocation de l'
Édit de Nantes les Audibert à l'instar de Henri IV lui-même passeront par opportunisme au catholicisme, obtenant ainsi de la régente Anne d'Autriche l'érection de leur seigneurie en Comté de Lussan. La Révocation de l'Édit de Nantes n'arrangera pas les choses, les Audibert vont choisir de se rapprocher de la Cour de France : mais c'est à Saint-Germain en Laye auprès de Jacques
II, roi détrôné et exilé d'Angleterre et d' Écosse qu'ils vont se retrouver. Ils ont alors pour héritière une fille GABRIELLE que l'on a présenté comme un fleuron de cette cour : "une des plus belles femmes de son temps, d'un esprit éclatant et d'une grâce infinie. Elle fut le joyau de cette triste cour de Jacques II". Très courtisée, Gabrielle porte son choix sur Henry Fitz-James, duc d'Albemarle, propre fils (illégitime) de Jacques II. Mais celui-ci va mourir très jeune et Gabrielle ne tardera pas à se remarier avec un autre écossais : Jean Drummond, duc de Melfort, pair d'Angleterre et d'
Écosse. Les Audibert-Melfort ne reviennent plus qu'épisodiquement à Lussan pour entretenir leurs châteaux, mais surtout pour vendre peu à peu des pans de leurs biens, leurs terres en particulier, pressés par des besoins d'argent qu'une vie de cour rend de plus en plus pressants. LE PROTESTANTISME : Vers 1550, la Réforme touche Lussan, suivant en cela les choix souvent plus politiques que religieux des seigneurs. Les Audibert sont en effet dans le camp protestant, mettant leur petite garnison à disposition du roi de Navarre, chef de file de ce camp et qui deviendra roi de France sous le nom d'Henri IV. Par contre, la conversion des Audibert au catholicisme n'aura pas d'effets sur la population. Avec Henri IV la paix était revenue, malheureusement tout va se gâter avec Louis XIV, mal inspiré et mal conseillé. Lussan va être un des premiers bourgs touchés par la répression contre le protestantisme, avant même l'acte de la Révocation de l'
Édit de Nantes : Le pouvoir royal fait abattre le temple. La Révocation de l'
Édit de Nantes est l'acte décisif qui bouleverse les mentalités et les comportements : Cévennes et Languedoc se soulèvent, Lussan est touché de plein fouet par la guerre des Camisards car la région du Mont-Bouquet et le Mont-Bouquet lui-même deviennent rapidement un lieu stratégique de la résistance et de la révolte. C'est l'époque des dragonnades, des conversions forcées, avec leur cortège d'exactions. En octobre 1703 une bataille meurtrière se déroule aux pieds de Lussan entre les Camisards conduits par Cavalier lui-même et les troupes royales. Chaque camp revendique la victoire (voir Henri Bosc, la guerre des Cévennes, Presses du Languedoc, tome II, p.417 à 423). En plus c'est dans la Lussanenque que s'est déroulé en Mai 1701 une affaire dont l'importance n'a que récemment été soulignée par les historiens : l'affaire de Vallérargues. En effet, c'est dans ce village qu'eurent lieu une des premières manifestations du prophétisme, phénomène qui devait tant dérouter le pouvoir royal. Cette affaire avait opposé le Prieur (curé) à la population, provoquant le saccage de l'église et une féroce répression. Tandis qu'une garnison tient en main le bourg de Lussan, dans les hameaux , les mas et les bois voisins se multiplient les assemblées du Désert, les Camisards se réfugient dans les grottes de la Lussanenque, des prédicateurs viennent entretenir la flamme. Le protestantisme ne sera jamais extirpé de la Lussanenque au cours du XVIIIème siècle. LA
RÉVOLUTION : Les coups que les Lussanais ont reçu de la Royauté expliquent pourquoi ils vont être perméables aux idées nouvelles et aux aspirations que la Révolution concrétisera. Les principaux notables de la communauté comme les Chastanier et les Gide rédigent les cahiers de doléance. Mais la plupart des Lussanais seront beaucoup plus réservés devant les excès de la Révolution et de l'Empire qui touchent Lussan promu chef-lieu de canton, après avoir été le refuge des Camisards, les bois touffus de la Lussanenque vont accueillir des suspects, des prêtres réfractaires, des objecteurs lorsque les circonscriptions à répétition épuiseront la population. Lors de la Terreur, la Convention présente dans le Gard avec un terrible représentant en mission met le collimateur sur Lussan : le maire J.B. Chastanier échappe de peu à la guillotine tandis que Théodore Gide choisit non le maquis, mais la garrigue, échappant aux recherches pendant plus d'un an. Le patrimoine culturel et historique des Lussanais s'enrichit même à cette occasion puisque après une "Grotte des Camisards" on voit apparaître une "Grotte Gide" sur les cartes topographiques. LE XIXème
SIÈCLE - L' ÉPOQUE ACTUELLE : Lussan atteint son apogée, particulièrement avec le développement de la production de la soie. La population dépasse les 1600 habitants. Remarquons que la production de matière textile et sa transformation a longtemps caractérisé Lussan, avec le développement des troupeaux de moutons, la production de chanvre (fin du Moyen Age) . Au cours du XVIIIème siècle des Lussanais se procurent des métiers à bas et se lancent dans ce type de fabrication. Cette tradition poussera les familles les plus dynamiques a s'intéresser à la production de la soie : on plante des mûriers, les mas se remplissent de magnaneries, trois filatures vont fonctionner à Lussan. Mais l'ouverture des frontières à la soie pratiquée par le second Empire va ruiner cette industrie : le déclin de Lussan commence. La saignée de la guerre 1914-1918 ne fait que s'ajouter à une désertification qui touche d'abord les zones ingrates économiquement, le monde de la garrigue en particulier. Aujourd'hui Lussan prend conscience de la richesse de son patrimoine culturel, de ses atouts climatiques. Les églises se reconstituent de plus en plus ouvertement. Mais beaucoup de Lussanais auront connu les prisons, les galères ou un exil duquel ils ne reviendront pas (c'est le cas d'une famille Gide). |